La prédiction du vent

Le vent réel est souvent dévié par des effets de site, causés par des montagnes, des pointes, une zone de terre chauffée, etc. Ces effets ne peuvent être identifiés qu’en naviguant préalablement sur le plan d’eau de manière répétée. Prendre l’avis des gens du coin n’est pas une mauvaise idée en soi, mais j’ai tendance à rester prudent. Le commentaire d’un pêcheur au début d’une manche sera souvent: "Le vent est très rarement comme ça!". Je préfère découvrir les choses par moi-même, vérifiant ou infirmant ainsi les théories locales.

Un partenaire d’entraînement peut être d’une valeur inestimable dans la préparation d’une régate, vous aidant à découvrir les tenants et les aboutissants deux fois plus vite et plus finement que vous ne pourriez le faire seul. Arrivés sur le site, vous pouvez naviguer sur un bord, lui sur l’autre pendant cinq minutes; puis vous virez tous les deux et recroisez. Le bateau qui croise devant aura navigué du côté favorable, que ce soit dû à une incurvation du vent liée au relief, à une bascule persistante, à plus de vent ou à toute autre raison. En recommençant plusieurs fois, vous aurez une idée précise des pourcentages.

Vents dominants

Une fois encore, il est important de s’accoutumer au type de vent susceptible de souffler durant la régate, et il est profitable de s’y préparer avant même le voyage.

Un certain nombre de sites, San Francisco ou Auckland par exemple, sont très souvent ventés, tandis que l’on peut s’attendre à du petit temps sur les lacs suisses. Ces facteurs jouent un rôle important dans votre façon de vous entraîner mais aussi dans la détermination du poids idéal, de la manière de gréer, etc..

Tout en mettant l’accent sur les conditions dominantes de vent, variez votre préparation pour n’avoir aucune faiblesse.

Systèmes de vents

Ils sont très intéressants, tout particulièrement pour les régatiers de l’hémisphère sud. Aux antipodes, nous avons plutôt tendance à louvoyer sur la gauche en cas d’incertitude sur l’évolution du vent. Mais l’effet général qui oriente la rotation des systèmes de vent inverse la tendance dans l’hémisphère nord où le côté droit sera plus souvent rentable.

Dans certains pays comme l’Angleterre existent de vrais régimes de vent. Après trois ou quatre jours de temps calme, s’installe un régime qui engendre une assez longue période de vents soutenus. Son développement peut être suivi sur les cartes météo, à tel point qu’il vous est possible de prévoir avec une assez bonne précision le moment de passage d’un front, et souvent la force du vent.

Bascules persistantes

Pour un régatier aussi conservateur que moi, les bascules persistantes peuvent être un vrai ennemi. Je ne navigue pas bien sur les sites où elles se manifestent. Je pense toujours que le vent va revenir un peu et qu’il sera ainsi possible de se recentrer.

Si le vent ne revient pas, il faut décider rapidement d’aller du bon côté pour profiter de l’évolution, tout en essayant de s’y enfoncer plus longtemps que celui qui, ayant viré trop tôt pour rester sur un bord favorable, devra finalement finir dans un énorme refus.

A Barcelone, site des J.O. de 1992, les oscillations peuvent durer une demi-heure, ce qui est la durée d’un bord de près, déterminant ainsi pour une grande part la tactique. Vous devez déterminer mentalement votre situation par rapport à la bascule en mémorisant des caps compas ou en les calculant.

Supposons par exemple que vos relevés bâbord amures soient compris entre 240 et 270 degrés. Si après avoir enroulé la marque vous lisez 240, vous êtes sur le bon bord; il est probable que le vent refuse avant la fin du bord et il faut donc continuer. Si le compas indique 270, il faut par contre virer rapidement.

Bien sûr, une oscillation n’est persistante qu’à l’échelle de la manche. Si votre près dure 20 minutes et que la période de l’oscillation est de 30 minutes, alors celle-ci est persistante. Mais si le près durait une heure, le même vent serait oscillant.

Vents oscillants

Dans la plupart des cas, il se produira deux ou trois bascules par bord de près. J’entends par là des variations importantes, de 10 à 15 degrés. Au sein de ces bascules, il y aura aussi des petites oscillations de cinq degrés ou moins, que vous ne détecterez pas au compas; vous ne les sentirez que si vous avez une perception fine des angles entre les bateaux dans la flotte.

Exploitez ces petites bascules pour rester avantageusement centré. Je préfère toujours limiter les risques: s’il y a un groupe de bateaux sous le vent, je me place dans l’adonnante, tandis que s’il se trouve au vent, j’attends le refus. En règle générale, j’attends toutefois les refusantes avant de renvoyer.

Le courant

Une façon simple de déterminer le courant consiste à peler une orange et à jeter la peau à l’eau, en observant sa dérive par rapport à un point fixe, par exemple une bouée. Si elle se déplace, mettons à un nœud, cela peut changer énormément votre stratégie, les laylines devenant très importantes.

Lorsque vous déterminez la position des bouées, prenez si possible des alignements à terre pour ne pas, au largue, être déporté trop bas ou trop haut par le courant. A titre d’exemple, un cap en apparence trop abattu peut vous placer en réalité sur la route directe.

Bien sûr, si l’on s’attend à une renverse du courant en cours de manche, il faut en connaître l’heure exacte et adapter sa tactique en conséquence.

Testez le courant en jetant à l’eau une peau d’orange près d’une bouée, et en estimant sa dérive sur 20 secondes: un courant d’un nœud la déplacera de 10 mètres dans ce laps de temps. Puis mangez l’orange.